David Biraud
Ex-candidat finaliste au concours du Meilleur Sommelier d’Europe et Vice-Champion du Monde 2016, le Chef Sommelier du Mandarin Oriental Paris et Directeur du restaurant Sur Mesure (chez Thierry Marx) possède un background non négligeable. Rencontre avec ce sommelier de haute endurance.

PEDAGOGIE

Les Concours: une expérience vécue à l’extrême richesse

Sélectionneur au sein de la Team France – laquelle a proclamé le 21 mars dernier le candidat proposé pour représenter la

France pour la 17ème édition du Concours ASI du Meilleur Sommelier du Monde Paris 2023 – David Biraud a le gout prononcé pour la compétition. Bien connu du circuit, ce sommelier UMOF 2004 classe sommellerie (un des Meilleurs Ouvriers de France) n’est pas un novice en matière de préparation aux concours de niveau national et international de sommellerie.

David Biraud, vous qui avez un palmarès ne faisant aucun doute sur votre goût pour la compétition à niveau international, que ressent un professionnel comme vous – au cœur de la Team France, aidé d’autres membres aguerris – quand votre mission est de préparer votre candidat désigné pour cette 17ème édition à Paris en 2023 ?

David Biraud: « Je suis très heureux d’être encore au contact de la compétition et je ressens encore le stress des candidats. Dans une moindre mesure et à petite dose mais on sent toujours une petite pression qui nous pousse à bien les entrainer et les accompagner. Nous ne sommes pas à leur place mais on ressent quand même la tension et la fébrilité à l’approche de l’échéance. »

Près de 70 candidats vont s’affronter du 7 au 12 février prochain. En matière de préparation pour un tel concours et d’un tel niveau, existe-t-il une méthode universelle applicable aux candidats ou bien chaque pays a-t-il sa propre vision, sa propre recette ? Autrement dit, existe-t-il une formation/préparation officielle, indépendante de la culture de chaque pays candidat ?

David Biraud: « C’est un peu la synthèse des deux à mon sens. Il y a une préparation internationale que l’on peut appliquer dans chaque pays car il y a des fondamentaux (la méthodologie de dégustation par exemple) et une trame commune. Les différences principales s’observent sur le feeling de la pratique de notre métier. La dégustation tend sur un style très anglo-saxon qui n’a pas le même objectif que les dégustations de style plus latin que nous avions pour habitude de pratique en France. »

Le concours du MSM est d’un niveau international d’une grande exigence envers les candidats. Dans quelle proportion le théorique et le pratique entrent-ils dans un jeu décisif pour permettre à un candidat de l’emporter ? Autrement dit, le bagage théorique seul ou le bagage pratique seul (l’expérience du terrain en salle) suffit-il pour qu’un candidat officiel affronte sereinement la compétition et ait toutes les chances de son côté ?

David Biraud: « Je ne saurais pas mesurer exactement la proportion mais comme le disait très justement Gérard Basset « La théorie ne fait pas gagner un concours mais elle peut le faire perdre ». La théorie ne fait jamais la différence sur les phases finales mais permet d’ouvrir les premières portes des qualifications donc on ne peut pas se focaliser que sur l’un des deux mais plutôt travailler à un profil complet. »

Parlez-nous des fondamentaux attendus chez un candidat international !

David Biraud: « Il faut être un sommelier qui aime servir, c’est la base de notre métier et doit être notre priorité. Nous devons être de bons commerçants. On attend du sommelier beaucoup de bienveillance vis-à-vis du client, de la technique aussi mais apporté à bon escient et avec humilité sans donner un cours magistral. Je dis toujours à mes équipes, « On est là pour donner des conseils et non pas des leçons »

Un candidat bien préparé par sa team l’affranchit-il de toute situation déstabilisante (la gestion du stress d’épreuves chronométrées et millimétrées) ou bien y-a-t’il de la place pour des scénarios inattendus, imprévus pour le candidat lui-même ?

David Biraud: « Évidemment il peut y avoir une infinité de scénarios possibles et aucun candidat ne pourra jamais avoir anticipé toutes les situations. Il faut travailler la gestion du stress et anticiper la déstabilisation car les exercices sont faits pour tester l’adaptabilité des candidats. »

Quelles sont selon vous les motivations principales qui poussent un candidat à participer à un tel concours international si complexe, si exigeant ? Est- ce le dépassement de soi ? Le goût du risque (se mettre en danger) ? Le « simple » jeu de la compétition (se mesurer aux autres) ? L’aventure humaine qu’il représente ?

David Biraud: « Se dépasser et l’aventure humaine. Le gout du risque me semble exagéré dans l’idée car il ne s’agit pas d’un danger physique. En revanche, on cherche à travers ses concours à se dépasser et à aller chercher la plus haute distinction de notre métier auprès de nos pairs. Et que l’on gagne ou non, l’expérience vécue est d’une extrême richesse. Le partage entre les candidats et le respect du travail bien accompli sont des vraies valeurs que j’ai eu la chance d’expérimenter. »